CHAPITRE II LA SITUATION DEMOGRAPHIQUE DANS LE MONDE
Le monde présente diverses situations démographiques qu’on a tenté d’expliquer avec le modèle de la transition démographique. Cette diversité s’exprime aussi dans la structure par âge opposant les pays pauvres avec les populations jeunes, et les pays riches au vieillissement marqué.
I. La transition démographique :
L’examen des changements intervenus dans la natalité et la mortalité des populations individualisées au XIXe siècle et au XXe siècle a conduit des démographes anglo-saxons à formuler une théorie de l’évolution démographique connue sous le nom de transition démographique dont le succès doit surtout à son universalité, même s’il est aisé de constater une chronologie et une intensité différente d’un pays à l’autre. Le modèle est décrit par un graphique dans lequel s’observe plusieurs périodes :
1. Le régime démographique pré-transitionnel :
Cette situation ancienne se caractérise par des taux très élevés de mortalité et de natalité.
Les taux bruts de mortalité peuvent atteindre 35‰ à cause des médiocrités des conditions de vie de la population (des épidémies très meurtrières tous les 15-20 ans, des disettes tous les 30 ans, et fréquemment des troubles politiques et des guerres, en plus des aléas climatiques avec les sécheresses et de fortes inondations).
La natalité est tout aussi élevée 38‰ à cause de l’ignorance des méthodes contraceptives (fécondité naturelle et surtout la nécessité d’assurer une descendance).
Dans ces conditions, les populations augmentent peu (TAN : 3%).
2. La transition proprement dite :
C’est la période des changements, deux phases voire trois peuvent être différenciées :
Dans la première phase ou début de transition, commence une érosion progressive de la mortalité du fait de l’amélioration des conditions de vie des populations (amélioration des conditions sanitaires, développement de l’hygiène publique et privé, l’amélioration de la production et de la productivité). La natalité par contre ne s’infléchit pas. La croissance de la population commence (T.A.N. : 2,3%).
Dans la deuxième phase ou milieu de transition : baisse de plus en plus de la mortalité, timide baisse de la natalité, la croissance de la population est ainsi très forte (TAN : 3,2%, un TN de l’ordre 41‰ et un TM de 9‰). Dans les pays concernés, l’instruction chez les femmes commence à se répandre. L’économie est plus diversifiée et l’amélioration des conditions d’encadrement social des populations et le développement des techniques médicales accompagnent ces évolutions.
Lors de la troisième phase ou fin de transition : la mortalité est devenue basse, elle décline maintenant avec plus de lenteur. En revanche, l’érosion de la natalité s’amplifie, débute alors une décélération progressive de la croissance démographique. Les pays concernés généralement émergents, connaissent une économie assez bien évoluée et en grande partie industrielle, une urbanisation galopante, un taux d’urbanisation supérieur à 75 %, un taux d’analphabétisme des adultes assez bas autour de 10 %.
3. La situation évoluée :
Le régime démographique post-transitionnel se caractérise par des taux faibles de natalité (11‰) du fait d’une large diffusion des méthodes contraceptives, et de mortalité (10‰), grâce à l’éradication de la plupart des maladies infectieuses. L’accroissement naturel est ainsi très faible autour de 0,1 %, comme dans l’ancien régime et la croissance « 0 » (Déjà atteinte dans beaucoup de pays).
Les trois grandes phases peuvent être ainsi résumées :
Une croissance stationnaire ancienne (naturelle)
La transition démographique
Une phase d’expansion initiale
Une phase d’expansion maximale
Une phase d’expansion finale.
La phase stationnaire moderne (artificielle).
On peut d’autre part, en mettant l’accent sur l’ancienneté et la
durée, isoler trois formes de transition démographique (longue, exportée et courte et inachevée.)
a. La transition longue (dans les pays européens) :
Précoce, elle a duré entre Un siècle et demi. Ces pays qui ont leur stade post-transitionnel au milieu des années 60, n’arrivent plus à renouveler leurs générations (2,9 taux de renouvellement)
b. Les transitions exportées :
Les pays concernés sont : les pays neufs, c’est-à-dire les pays de l’Océanie (Nouvelle Zélande, Australie, …) qui ont importé d’importants flux migratoires européens. Débutant dans ces pays au milieu du XIX e siècle, la transition démographique y a duré entre 60 et 80 ans.
c. Les transitions courtes et inachevées :
Elles concernent dans la plupart des cas, les pays du tiers-monde et s’effectuent entre 40 et 50 ans. Cette brièveté s’accompagne d’une croissance démographique excessive.
Conclusion : Ces variations spatiales des formes de la transition démographique permettent de mieux comprendre la diversité des structures démographiques dans le monde.
II. Les problèmes de structure par âge :
L’examen de la structure par âge permet d’opposer les pays à populations vieillies n’assurant plus le renouvellement des générations aux pays jeunes à l’extraordinaire potentiel démographique. Le degré d’avancement dans la transition démographique permet d’expliquer une telle opposition.
1. La jeunesse de la population :
Les pays qui sont confrontés à la jeunesse de leurs populations ont une pyramide en tour Eiffel ou en parasol, ou de forme triangulaire avec une base large et un redressement progressif vers le sommet. Un fort pourcentage de jeunes résulte soit d’une fécondité assez soutenue (au cours des 15 dernières années), soit d’une substantielle immigration de jeunes adultes prolifiques, soit aussi d’une faible mortalité des tranches d’âge allant de 1 à 40 ans.
Les jeunes sont nombreux dans les pays à économie rurale où ne posent pas le problème de la scolarité prolongée ou celui des charges sociales assez élevées imposées par les jeunes. Un autre groupe rassemble les pays neufs en plein développement économique qui peuvent encore accueillir à la fois des immigrants et des naissances nombreuses. La jeunesse démographique pose un certain nombre de problèmes d’ordre démographique et économique.
Les pays jeunes et surpeuplés constituent le plus souvent un potentiel d’émigration au moment où les pays récepteurs se barricadent.
Sur le plan économique, les conséquences sont encore plus délicates surtout dans le cadre d’une nation surpeuplée et de surcroit sous développé : problèmes de l’éducation, et surtout des charges. Les charges sociales pour les familles (entretien des enfants), et pour la collectivité (scolarisation, santé, logement, …) sont gonflées au point de gêner l’épargne, de freiner l’investissement et de maintenir le niveau de vie moyen très bas. Entre autres problèmes touchant les pays jeunes : l’emploi, l’importance de la population à charge (les moins de 15 ans et les plus de 60 ans), le grossissement du prolétariat, l’insécurité,….
Faut-il pour autant incriminer la croissance démographique et la rendre responsable du sous-développement ? En réalité, ce n’est pas la forte croissance qui est à la source du sous-développement, mais l’organisation générale de la société, les erreurs dans les priorités etc…. En d’autres termes, l’explosion démographique n’est que le premier obstacle au développement.
2. Le vieillissement démographique :
La pyramide est en ogive ou en urne. Le vieillissement d’une population résulte essentiellement de la baisse de la fécondité (« croître ou vieillir » comme dit Alfred Sauvy) qui peut s’expliquer par le coût de l’enfant, la recherche du bien-être, l’urbanisation, le statut de l’enfant qui passe de la situation de bien d’investissement à celle de bien d’équipement. A un pays disposant d’un fort contingent de vieux (entre 11 et 15 % de plus de 64 ans contre 17 % des jeunes) se pose toute une série de problèmes. Le vieillissement provoque à longue échéances, une diminution de la tranche d’âge des jeunes adultes (20 – 40 ans) donc du potentiel humain le plus actif et une augmentation du pourcentage de la main d’œuvre productrice d’où l’abaissement du moyen individuel. Il en résulte une augmentation de la fiscalité car la population active supportera longtemps la double charge provenant de l’augmentation simultanée de la part des vieux et de celle des jeunes. Les conséquences politiques sont tout aussi fortes. La structure par âge du corps électoral incite les hommes politiques à conduire une politique sénile, le dynamisme économique s’en ressent plus que les sommes allouées à l’action sociale sont perdues pour l’investissement.
On mesure à travers ces quelques conséquences la gravité du phénomène du vieillissement démographique dont la solution réside dans l’accroissement de la natalité. Cependant, il reste à noter que la reprise de la natalité ne fait pas disparaitre immédiatement le vieillissement dont les effets se poursuivront encore longtemps. La reprise de la natalité est donc un remède à longues échéances.
III. Les politiques de population :
Leur objectif est la modification des pratiques constatées dans les pays à population vieillie ou jeune.
Dans les pays à population vieillie, les politiques visent à stimuler la natalité pour éviter un vieillissement excessif (« croître ou vieillir » SAUVY). En dépit d’une foule de mesures diverses (financières, fiscales, sociales) les couples très attachées à leurs niveaux de vie ne sont nullement incitées à augmenter le nombre de leurs enfants.
D’autre part, la reprise de la natalité ne fait pas disparaître immédiatement le vieillissement. Dans le tiers-monde menacé de surpopulation, les politiques visent à freiner le rythme d’accroissement de la population (espacement des naissances, légalisation de l’avortement dans certains pays, stérilisation des femmes,…). Ces pays ont cependant accumulé dans leur structure par âge de tel potentiel d’accroissement qu’on ne peut s’attendre à les voir croître à un rythme lent (entre 1 et 1,5 % par an) avant très longtemps. Pour l’heure, la valeur accordée à nombreuse descendance dans le cadre d’une économie agricole, les considérations religieuses, les coutumes, la faible instruction notamment des femmes, l’insuffisance des services médicaux peuvent écarter tout intérêt individuel pour une quelconque maîtrise de la fécondité.
Parallèlement, aux programmes de limitation des naissances, il convient de définir des politiques visant à promouvoir le développement économique, social et culturel, globalement nécessaires à l’émancipation des Hommes. Sans cela, toutes les initiatives menées dans le sens de faire baisser la fécondité sont vouées à l’échec. En définitive, une politique a d’autant plus de chances de succès qu’elle accompagne, conforte et amplifie une évolution en cours. Cela est valable aussi bien pour les pays riches que pour les pays pauvres.
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